Le service du monde me motive pour continuer à devenir prêtre. IL en est de même pour le désir de suivre Jésus dans sa liberté et son style de vie. Des prêtres qui rendaient visite à mes parents commerçants, savaient faire advenir leur parole. Cela faisait du bien à mes parents d’accueillir du sens dans leur vie chargée. Un prêtre emmenait le groupe de copains de lycée avec lequel j’étais autant dans une abbaye qu’au ski, nous qui ne connaissions pas la montagne.
Un prêtre heureux
L’Église qui m’a accueilli et m’a appelé n’était pas alors frappée par la révélation, de ses crimes d’abus. J’ai été heureux comme prêtre d’être compagnon de jeunes. Heureux de leur proposer des beaux rendez-vous qui ont contribué à les lancer dans la vie et la foi.
Devenir prêtre aujourd’hui ?
Quelquefois il m’arrive de m’interroger, est-ce que je serais entré au séminaire aujourd’hui, tant le monde et l’Église apparaissent tellement fermés ? Je pense. Deux raisons qui continuent de me motiver : la communion avec le Seigneur ; la communion des baptisés.
Prêtre et serviteur
L’Église n’est fidèle à son Seigneur que sous le régime qu’il lui a enseigné ; être ministérielle et synodale. Cela signifie qu’elle n’est signe pour le monde que dans la richesse des relations entre les personnes. Dans cette ministérialité certains baptisés sont signe du don total du Christ qui rejoint et emplit une vie. Or c’est pour que tous aillent à cette source. Cela ne donne aux ministres ordonnés aucun privilège.
Signes du Christ pasteur et serviteur
Le Concile Vatican II a dit des évêques et des prêtres qu’ils sont signes du Christ pasteur (avec le risque de surplomb choisi peut-être par certains). Il a explicité la restauration du diaconat comme signe du Christ serviteur. D’ailleurs, il est heureux que le pape Benoit XVI ait précisé la catégorie englobante des trois composantes de l’unique sacrement de l’Ordre (évêque/prêtre/diacre) est celle du « service du Peuple de Dieu » (Canon 1008). De fait les évêques et les prêtres sont ordonnés diacre (ce que représente aux yeux de beaucoup l’appel au service) avant l’ordination qui les a faits devenir prêtre ou évêque. Les ministres ordonnés sont nécessaires pour rappeler le don du Christ et son envoi qu’il adresse à tous.
Prêtre et laics : marcher ensemble
Le baptême reçu donne à tous les laïcs la capacité de soutenir et d’accompagner les personnes sur leur chemin de vie et de foi. Je pense notamment à ces deux situations ; l’accompagnement des familles en deuil et l’accréditation par l’Evêque de laïcs et de religieux autant que de prêtres pour être accompagnateur spirituel dans les diocèses au terme d’un parcours de formation que tous suivent. Ministres ordonnés et laïcs sont donc faits pour marcher ensemble. J’aime l’Église lorsqu’elle est famille, biodiversité, équipe. Ainsi dans la vie paroissiale, l’animation pastorale est sous la responsabilité du pasteur qu’est le curé. Mais est partagée avec une équipe. Idem en aumônerie de prisons ou d’hôpital ou dans l’Enseignement catholique.
Tous prêtres, prophètes et roi
Si l’évêque et les prêtres occupent ministériellement dans le Corps du Christ la place du Christ-Tête qui enseigne, sanctifie et gouverne son Corps (ils rappellent la force des Écritures et des sacrements ainsi que le souci de tous, particulièrement des plus pauvres) c’est pour que les baptisés laïcs exercent ces mêmes missions prophétique, sacerdotale et royale, liées à leur baptême, dans toute leur vie. Quelle chance ai-je eu de pouvoir par des études et par l’enseignement accueillir et présenter le sens de la ministérialité et de la synodalité de l’Eglise. En 2021 le Pape François ouvre la possibilité des ministères de lecteur et d’acolyte à tous les laïcs. Il établit le ministère de catéchiste. L’Eglise est un Corps vivant à qui lui sont nécessaires des articulations comme le dit si bien St Paul !
Prêtre dans la Famille Cor Unum
J’apprécie depuis mon entrée dans la famille Cor Unum (On parlait des Gem lorsqu’on m’y a invité en 1990) la possibilité de partager laïcs et prêtres au sein d’une même équipe ; « La mixité de nos états de vie dans nos équipes SVE est une grâce ; nous désirons qu’elle augmente dans toutes les régions. Nous contribuons à développer la synodalité en Eglise » (Orientations 2022-2028 pour la Société de Vie évangélique du Cœur de Jésus). Je suis au cœur de l’une des deux raisons qui m’ont fait souhaiter être prêtre.
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Être plongé dans le baptême de Jésus
Le baptême qu’a vécu Jésus a été source de joie et de vie pour lui et pour le monde. Il est allé de plus en plus loin dans l’offrande de sa vie (du baptême jusqu’à la croix). Sans cesse il disait à son Père que Sa volonté était bien meilleure que la sienne.Il se présentait au Père pour que Celui-ci l’investisse par son Esprit de sorte que Son règne puisse advenir.
Offrir notre vie au Père
Eh bien ce mouvement est le secret aussi de notre vie et de notre joie ; nous pouvons chaque jour nous présenter nous aussi au Père parce que nous croyons en Sa volonté qui ne cherche que notre bien et nous savons que son Royaume n’adviendra que par notre conversion (ce que le Pape François exprime ainsi en final de Laudato si’ « […] son amour nous porte toujours à trouver de nouveaux chemins. Loué soit-il » n° 245).
Vivre du baptême de Jésus
J’ai découvert ce secret à mesure. Bien sûr il était déjà là en moi. Aujourd’hui je me le formule à moi-même de façon plus intelligible et je peux inviter à ce mouvement. Nous pouvons tous vivre du baptême de Jésus, c’est-à-dire remettre au Père et à Jésus les souffrances présentes et les choses à venir. Mais quoi qu’il en soit des échecs, des déplacements et des conversions qui affectent tant et tant de personnes autour de nous (et nous avec), le regard, la main, la Parole du Christ et son Corps sont notre boussole. Il s’est donné pour nous alors que nous étions pécheurs. Plus que l’effort pour le suivre, nous sommes plongés en Lui, dans son baptême. Il nous porte. Et l’espérance est donc possible.
Être prêtre m’engage
Nous entendons le cri des personnes pour être reconnus, considérés et pour une juste répartition des richesses (le pouvoir de vivre avec aussi celui d’acheter pour les siens et pour soi). Aussi dans ce monde où je vis, j’ai bien conscience que ma relation au Seigneur engage la relation de ceux qui m’entourent. C’est le Seigneur qui passe par moi, pour qu’ils retrouvent la confiance nécessaire pour vivre et non survivre. Ma prière n’est pas pour moi, elle est pour le monde. Elle est une responsabilité (celle de la Prière de l’Église que le prêtre a particulièrement à vivre). Je remercie Cor Unum de m’avoir encouragé sur le chemin de l’oraison à l’école de St Ignace.
La force de vie des personnes
Prêtre et membre de la Société de vie Evangélique du Cœur de Jésus au sein de la Famille Cor Unum j’avance doucement. Je suis sans cesse surpris de la force de vie des personnes (le Seigneur est derrière elles !), et étonné de la confiance des gens et du Seigneur à mon égard. C’est bon de penser que ce que je fais est extrêmement petit ; je ne suis pas le Bon Dieu. J’aime cette phrase « On ne peut pas donner rendez-vous au vent, mais on peut laisser la fenêtre ouverte » (Michel Beghin).
J’essaie par les fenêtres que je veux tenir ouvertes de la synodalité et de la communion rappelée et offerte (notamment par Cor Unum). Cela permet à l’Esprit du Seigneur de nous saisir, Lui qui peut faire toutes choses nouvelles.
Christophe Decherf, prêtre en SVE ; 30 octobre 2022